3.5.LES FRAIS/COUTS D'UN TRAITE PROPORTIONNEL

 

3.5.1. LA COMMISSION

 Une compagnie d’assurances, pour constituer et gérer son portefeuille, engage des dépenses importantes. Ces dépenses comprennent notamment :

  • Les commissions versées aux apporteurs d’affaires (courtiers et agents).
  • Les frais généraux liés à la gestion technique et administrative des polices.

Dans le cadre d’un traité proportionnel, il est logique que la cédante demande à son réassureur de contribuer à ces coûts d’acquisition et de gestion.

Exemple de calcul de commission

Si la compagnie d’assurances :

  • Verse des commissions aux apporteurs d’affaires équivalant à 25 % des primes encaissées.
  • Supporte des frais généraux à hauteur de 7 %.

Alors, pour équilibrer ses coûts, elle demandera une commission à la réassurance de 32 %.


Modalités de calcul de la commission

La commission peut être calculée de différentes manières et dépend de plusieurs facteurs :

  1. Commission fixe :

    • La commission est déterminée à un pourcentage fixe des primes cédées, indépendamment des résultats.
  2. Commission variable (Sliding Scale Commission) :

    • Cette approche lie le pourcentage de commission au résultat technique (Loss Ratio ou L/R, rapport sinistres/primes) obtenu en fin d’année.
    • Une commission provisoire est versée au début de la période. Elle est ensuite ajustée selon une échelle prédéfinie, par exemple :
      • Commission : 25 % à 35 %.
      • Loss Ratio : 52 % à 72 %.
Exemple de Sliding Scale Commission
  • Si le Loss Ratio en fin d’année est de 62 %, la commission s’élève à 30 %.
  • Cette commission est ajustée dans le compte de fin d’année, en tenant compte de la commission provisoire déjà versée dans les comptes trimestriels ou semestriels.


Points Clés
  • La commission est inversément proportionnelle au Loss Ratio : plus le Loss Ratio est bas (meilleure rentabilité), plus la commission augmente.
  • La commission est toutefois encadrée par des limites, fixées dans le traité, pour éviter des écarts extrêmes :
    • Elle ne sera pas inférieure au minimum (par exemple, 25 %).
    • Elle ne dépassera pas le maximum prévu (par exemple, 35 %), même si le Loss Ratio sort de l’échelle.

Ce mécanisme garantit un partage équitable des coûts et des résultats entre la cédante et le réassureur.

 

3.5.2 Les "Unearned Premium" et Dépôts

Les traités proportionnels, généralement, fonctionnent selon le principe du "Risk Attaching", ce qui signifie que les primes versées au réassureur concernent des risques dont la date d'effet de la police originale se situe pendant la période de couverture du traité.

Impact des dates d'effet des polices
  • Si un traité couvre la période du 01/01/2019 au 31/12/2019, les polices rattachées au traité peuvent avoir des dates d’expiration différentes, par exemple :
    • Police A : 01/03/2019 – 28/02/2020.
    • Police B : 06/04/2019 – 05/04/2020.
    • Police C : 02/12/2019 – 01/12/2020.

En conclusion, à la fin de la période du traité, certaines polices demeurent non expirées et peuvent donc encore générer des sinistres après la date d’expiration du traité, fixée au 31/12/2019.

En général, un traité est conclu pour une durée d’un an. Que la convention soit reconduite ou non, la cédante doit constituer, au 31/12, une provision technique. Les primes correspondant à cette portion "non expirée" sont appelées primes non acquises (Unearned Premium). L’ensemble de ces primes forme la réserve de primes non acquises (Unearned Premium Reserve), également considérée comme une provision technique.

Si la cédante ne constitue pas cette réserve, elle devra couvrir ces engagements avec ses propres ressources. Cela pourrait entraîner un déséquilibre financier, car elle aurait perdu une partie de son flux de trésorerie tout en devant assumer intégralement les charges suivantes : sinistres en suspens, risques en cours et provisions mathématiques.

Le traité peut stipuler que le réassureur n’est pas tenu de constituer ou de déposer une provision technique. Dans ce cas, le réassureur bénéficierait d’un cash-flow favorable.

Cependant, et notamment en France, les provisions techniques doivent être constituées par l’assureur au brut des cessions. Cela oblige l’assureur à solliciter ses réassureurs pour leur participation. Le dépôt qui en découle peut être réalisé de deux manières :

  1. En espèces (cash) :

    • Les fonds sont déposés sur un compte bancaire par la cédante et libérés l’année suivante, avec un crédit d’intérêts pour les réassureurs. Le taux d’intérêt applicable est précisé dans le traité.
  2. En titres (bonds) :

    • Les titres sont inscrits au débit du compte, mais ne résultent pas, bien entendu, d’un solde financier réel.

Exemple : Dépôts et Comptes Conditions du traité
  • Durée : 01/01/2019 – 31/12/2019.
  • Commission fixe : 30 %.
  • Dépôts primes : 40 % en cash.
  • Dépôts sinistres : En cash.
  • Comptes : Semestriels.
Premier compte : 30/06/2019
Éléments Montant (€)
Primes +250.000
Sinistres payés -25.000
Commission -75.000
Dépôts primes (UPR) -100.000
Réserves sinistres (OSD) -20.000
Solde primes +75.000
Solde sinistres -45.000
Versement au réassureur +30.000
Deuxième compte : 31/12/2019
Éléments Montant (€)
Primes +300.000
Sinistres payés -45.000
Commission -90.000
Dépôts primes constitués -120.000
Dépôts primes libérés +100.000
Intérêts sur dépôts +4.000
Réserves sinistres déposées -60.000
Réserves sinistres libérées +20.000
Solde primes +194.000
Solde sinistres -85.000
Versement au réassureur +109.000
Situation au 31/12/2019
Éléments Montant (€)
Total primes +550.000
Total sinistres payés -65.000
Total commission -165.000
Dépôts primes (UPR) -120.000
Intérêts sur dépôts +4.000
Réserves sinistres -60.000
Solde primes +269.000
Solde sinistres -125.000

Le traité reste ouvert au-delà de cette date, car certaines polices expirent après le 31/12/2019.

3.5.3. Les entrées et sorties de portefeuille.

Une solution simple consiste à ce que le réassureur reste engagé sur tous les risques couverts par le traité jusqu’à leur échéance, en participant aux sinistres qui pourraient survenir. Cependant, dans la pratique, cette disposition entraîne des lourdeurs administratives, car le traité peut rester ouvert pendant plusieurs années d’un point de vue comptable.

Pour les risques en cours, il n’y a pas de date précise pour la fin des engagements. Les comptes continuent d’être émis, ce qui engendre des frais généraux. En ce qui concerne les sinistres en suspens, la situation est plus complexe : leur montant exact est souvent mal connu en fin d’exercice, pouvant générer des profits ou pertes, selon les circonstances et en toute bonne foi des parties.

La liquidation des sinistres liés aux dommages aux biens (short tail) est relativement rapide, tandis qu’en matière de responsabilité civile (long tail), leur évaluation peut prendre plusieurs années.

Pour éviter ces complications, les deux parties peuvent décider de mettre fin à leurs engagements réciproques en appliquant une procédure de sortie de portefeuille.

Sortie de portefeuille : Risques en cours

Le réassureur restitue une part des primes reçues au cours de l’année nn (souvent un montant forfaitaire de 40 %). La cédante reverse ce montant au réassureur de l’année n+1, qui prendra en charge les engagements liés aux risques en cours.

Sortie de portefeuille : Sinistres en suspens

Pour les sinistres en suspens au 31/12/2019, le réassureur sortant verse un montant (généralement 90 % des provisions établies) à la cédante. Celle-ci, à son tour, crédite le réassureur entrant en n+1, qui assumera les paiements liés à ces sinistres.

Cette réduction (souvent 10 % %) est un rabais accordé en raison du paiement anticipé, avant la clôture définitive des sinistres.


Exemple : Sortie de portefeuille au 31/12/2019

Prenons le cas où un réassureur résilie son traité au 31/12/19. Le contrat prévoit des sorties de portefeuille de 40 % des primes et 90 % des sinistres.

Éléments Montant (€)
Sortie de portefeuille primes (40 %) -220.000
Sortie de portefeuille sinistres (90 %) -54.000
Libération des dépôts primes +120.000
Intérêts sur dépôts +6.000
Libération des réserves sinistres déposées +60.000
Solde primes -94.000
Solde sinistres +6.000

Le réassureur devra verser un total de 88.000 € à la cédante pour se libérer définitivement de toute responsabilité après le 31/12/2019.


Entrée de portefeuille

Le réassureur 2 prenant la relève au 01/01/2020 se verra crédité :

  • 220.000 € au titre des primes.
  • 54.000 € pour les sinistres en suspens.

Cette entrée de portefeuille transfère la responsabilité du développement des risques (short tail et long tail) au nouveau réassureur.

Il est essentiel de noter que, pendant la période de transition, les résultats techniques peuvent paraître artificiellement élevés en raison des crédits d’entrée de portefeuille. Toutefois, ces montants doivent être compensés par des débits correspondant aux sorties de portefeuille à la fin de l’année de participation. Tant que ces opérations ne sont pas finalisées, il est impossible de déterminer le résultat final du traité.

 

3.5.4. Calcul du "Profit Commission " (Participation bénéficiaire )

Tout comme pour la commission mentionnée précédemment, le réassureur doit participer à l’équilibre des coûts et, le cas échéant, au partage des bénéfices réalisés.

La Profit Commission (P.C.) est calculée à la fin de l’année comptable. Elle prend en compte l’ensemble des produits et charges supportés par le réassureur, à l’exclusion du courtage.

Le traité définira :

  • Le pourcentage de bénéfice à reverser.
  • Le pourcentage des Management Expenses (M.E.), ou frais généraux, calculés sur le montant des primes perçues.
  • La possibilité d’un report des pertes des années précédentes, appelée Loss Carried Forward (L.C.F.), également stipulée dans le traité.

Exemple de calcul de la P.C.

Supposons que notre traité inclut les conditions suivantes :

  • P.C. : 30 %.
  • M.E. : 5 %.
  • L.C.F. : 3 ans.

Au 31/12/2019, la situation comptable est la suivante (en EUR) :

Entrées Montant (€)
Primes +550.000
Entrée de portefeuille primes +220.000
Entrée de portefeuille sinistres +110.000
Total entrées +880.000
Sorties Montant (€)
Sinistres payés -65.000
Commission -165.000
Frais (taxes, etc.) -12.000
Sortie de portefeuille primes -220.000
Sortie de portefeuille sinistres -54.000
Management Expenses (5 %) -27.500
Loss Carried Forward (3 ans) -18.000
Total sorties -561.500

| Résultat net | 318.500 € | | Profit Commission (30 %) | 95.500 € |
Le réassureur versera une participation bénéficiaire de 95.500 € la cédante.

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